"L'immobilier résidentiel moyen de gamme présente une série d'avantages"
18 septembre 2023
Le CEO d'Investis explique ses choix stratégiques et livre son analyse du marché de l'immobilier dans la région lémanique.
Le Valaisan Stéphane Bonvin a fondé la société immobilière Investis en 1994. L’autodidacte possède encore 77% des actions et des droitsde vote du groupe depuis son entrée en bourse en juin 2016. Jusqu’en 2010, Investis était focalisée sur les investissements immobiliers résidentiels moyen de gamme, en particulier dans les cantons de Genève et de Vaud. Par la suite, Investis est entrée de plain-pied dans les services immobiliers sur l’ensemble du territoire suisse. En 2022, les recettes d’Investis se sont élevées à 228 millions de francs pour un profit net de 151 millions. Fin 2022, le groupe employait 2334 personnes.
Quel regard portez-vous sur le cadre juridico-administratif du secteur immobilier en Romandie ?
C’est une question d’une brûlante actualité car la pénurie d’appartements – notamment à Genève – est de plus en plus sérieuse. Pour chaque appartement vacant, nous recevons une centaine de candidatures! Évidemment, l’arrivée de 2400 nouveaux résidents à Genève durant le premier trimestre de cette année n’a rien arrangé. Malheureusement, les lois et les règlements actuellement en vigueur découragent beaucoup trop les investisseurs et l’offre de nouveaux appartements est donc très insuffisante. Les entraves administratives en sont la cause principale. Saviez-vous qu’à Genève 500 jours en moyenne sont nécessaires pour obtenir un permis de construire ? Et le manque de liberté dans la fixation des loyers est un autre problème. Au niveau fédéral, la Loi sur l’aménagement du territoire (LAT) est source de sérieuses difficultés. Il est d’ailleurs contre-productif que de telles lois, malgré leur complexité, soient soumises au vote populaire.
Pourquoi est-ce qu’Investis se focalise sur le marché résidentiel moyen de gamme alors que, par exemple, les assurances préfèrent investir dans des immeubles commerciaux ?
Investis doit faire de l’argent alors que les assurances doivent surtout placer leurs fonds, quitte à obtenir des retours à très long terme. A mon sens, l’immobilier résidentiel moyen de gamme présente une série d’avantages. Primo, la demande est forte et peu cyclique car il s’agit de satisfaire un des besoins prépondérants de la population. Secundo, les loyers peuvent être augmentés régulièrement car notre taux annuel de rotation des locataires s’élève à 11%. Tertio, peu de temps après avoir investi dans un nouvel immeuble, nous percevons déjà les premiers retours sous forme de loyers. En résumé, les marchés résidentiels moyen de gamme sont sans doute un peu ennuyeux mais ils offrent des rendements élevés moyennant des risques réduits.
Dans l’arc lémanique, quels sont les risques d’un tassement de la demande pour les immeubles résidentiels, par exemple pour des raisons fiscales (abolition du «step-up»...) ?
Dans ce segment, le facteur principal est la croissance démographique, mais les taux d’intérêt et les conditions-cadres – y compris la fiscalité – jouent également un rôle. En général, je ne crains pas de tassement de la demande. Concernant le « step-up »*, je ne suis pas inquiet, même si cet instrument fiscal devrait être aboli avec la mise en œuvre du projet de l’OCDE sur l’imposition minimale des grands groupes internationaux. D’une part, cette abolition concernerait peu d’entreprises. D’autre part, des taux aux alentours de 14 à 15% (selon le type d’entreprise) sont quand même très attractifs dans une région qui offre de multiples autres atouts, à commencer par la stabilité.
En 2016, vous avez décidé d'entrer à la Bourse suisse. Etait-ce une bonne décision ?
J’en suis globalement satisfait malgré une réglementation de plus en plus contraignante. La publication de nos comptes à intervalles réguliers génère une saine pression. En plus, une cotation génère une forte visibilité, ce qui se traduit par la génération de nouvelles affaires et une plus grande facilité à recruter des talents. Et si nous avions besoin de 100 à 200 millions, nous pourrions les lever rapidement grâce à notre cotation. Avec notre entrée en bourse, nous devons bien sûr participer à de nombreux roadshows ; à vrai dire, cet exercice me plaît et j’adore parler d’Investis... Avant la cotation, j’étais un peu inquiet car je me demandais si j’allais pouvoir continuer mon mode de vie discret. Heureusement, dans une large mesure, ces craintes étaient infondées.
Pensez-vous que la bourse valorise correctement votre action ?
La valorisation de notre action est passée de 53 fr. à plus de 100 fr. Néanmoins, je pense que nous sommes encore sous-évalués car le marché ne valorise pas correctement nos succès dans les services immobiliers et nos investissements dans certaines start-up.
A l'âge de 11 ans, je lisais déjà le journal économique suisse allemand Finanz und Witschaft.
Investis a racheté une multitude de sociétés. Quel est votre credo concernant les fusions et acquisitions ?
Dans notre groupe, les sociétés acquises gardent une bonne autonomie et, dans tous les cas, nous conservons les marques fortes. En revanche, pour optimiser l’efficacité de notre groupe, nous intégrons et digitalisons les fonctions de back-office.
Lorsque vous recrutez de nouveaux cadres, sur quels aspects êtes-vous particulièrement attentif ?
Je suis constamment en déplacement entre Zurich, Genève et le Valais. Lorsque je rencontre des talents, c’est-à-dire des personnes capables de transformer une vision en réalité, je m’en souviens. Et je n’hésite pas à les recontacter en cas de besoin. Mais, chez Investis, nous favorisons beaucoup les promotions à l’interne, notamment celles des employés qui font preuve d’une grande curiosité et qui analysent l’environnement de leurs affaires.
En tant qu’employeur, trouvez-vous que le système de formation suisse prépare correctement au monde de l’entreprise ?
Je n’ai pas pu achever mes études universitaires car j’étais tellement occupé avec mes premières affaires. Néanmoins, j’ai quand même décroché une maturité fédérale économique à Lausanne et cela m’a donné de bonnes bases, notamment en comptabilité. En résumé, je dirais que la formation suisse est de qualité, mais là où le bât blesse, c’est que seulement 6% des étudiants souhaitent créer leur propre entreprise. A Londres – où mes deux fils aînés ont étudié – j’ai l’impression que les études éveillent davantage d’intérêt pour l’entrepreneuriat.
Quid de la formation spécifique à l’immobilier ?
Elle fait surtout partie des cursus de formation continue. Mais, en général, notre industrie – et a fortiori la formation – a toujours un certain temps de retard par rapport aux besoins du moment. Par exemple, une compétence actuellement très demandée est la capacité d’analyser et d’exploiter un très grand nombre de données, notamment pour pouvoir automatiser – à l’instar d’Amazon – nos réponses à la pléthore de courriels standards. C’est pour cette raison que nous investissons dans certaines start-up comme Perty, spécialisée dans le développement de solutions digitales applicables à l’immobilier.
Concernant les nouvelles technologies, que pensez-vous des applications de la blockchain dans l’immobilier ?
Je suis féru des nouvelles technologies et suis persuadé que la blockchain permettra des applications très utiles dans notre industrie, par exemple en permettant la «tokenisation» de biens immobiliers. De plus, grâce aux «smart contracts», il est possible d’automatiser des opérations routinières, notamment le renouvellement des baux. C’est dans ce contexte que nous collaborons avec le capital-risqueur Guillaume Dubray (Polytech Ventures) et que nous avons investi notamment dans Taurus, une start-up genevoise spécialisée dans la gestion des cryptomonnaies et des actifs «tokenisés».
Fondé en 1994, le groupe Investis a deux pôles d’activité: le pôle « Properties » axé sur les investissements dans l’immobilier, principalement des immeubles résidentiels dans la région lémanique. Au 31 décembre 2022, le portefeuille d’Investis a été évalué à 1508 millions de francs. Ce pôle comprend les sociétés Investis Properties, Alaïa Invest et Perty Technologies.
Le pôle des services immobiliers est composé de deux segments : « Property Management » avec la société Privera et « Facility Services » qui comprend les sociétés Hauswartprofis, Conciergepro, Rohr, Analysis Lab et AGD Renovationen. Récemment, le groupe Investis a poursuivi la croissance de son pôle de services immobiliers avec l’acquisition en 2022 des sociétés Home Service et Aatest. Le groupe Investis est très peu actif dans le développement immobilier.
* Ndlr: le step-up permet à des entreprises internationales, anciennement au bénéfice de statuts fiscaux spéciaux, de conserver leurs avantages durant dix ans après la mise en œuvre de la dernière réforme de la fiscalité des entreprises (RFFA).
Source : Immobilier.ch
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